Cartes blanches

Copyright JaimebisbalCarte blanche d'un collectif de signataires, dont Christian Kunsch, président du MOC, parue dans Le Soir.

Ce jeudi 9 février, la « loi Peeters » sur la réorganisation des carrières devrait être adoptée à la Chambre en plénière. 60 personnes du monde académique, associatif et syndical signent cet appel pour un autre projet de société.

 

Le chômage et les burn-out explosent. Entre celles et ceux qui travaillent trop et d’autres qui cherchent un travail, les signataires de cet appel sont convaincus qu’une meilleure répartition du temps de travail est possible. Elle est porteuse d’un tout autre projet de société, d’une émancipation laissant place à plus de temps pour soi et les autres, pour se mobiliser, pour s’épanouir. Quelle qu’en soit la forme, elle doit garantir le maintien du salaire et une embauche compensatoire sans accélération des cadences.

 

L’heure est venue de reprendre le mouvement historique de la réduction collective du temps de travail (RCTT) en osant aller à l’encontre du discours dominant laissant croire que l’allongement du temps de travail est inéluctable (projet de loi Peeters, âge de la retraite à 67 ans, etc.) ! C’est l’objectif de cet appel lancé par des citoyens, indépendamment de tout parti politique, pour remettre cet enjeu essentiel au cœur du débat de société.

Relançons le mouvement sur www.travaillermoinsvivremieux.be !

 

Le travail produit cinq fois plus : qui en profite ?

 

Grâce aux technologies et à l’amélioration du niveau de qualification des travailleurs, la productivité a été multipliée par 5 en 50 ans (1). Pour produire autant de richesse, il faut donc 5 fois moins d’heures de travail, tous secteurs confondus. Du jamais vu ! Mais qui a capté ces gains de productivité accrus : les entreprises, les actionnaires, l’Etat ou les travailleurs ?

 

Les « trente glorieuses » (1945-1975) ont été marquées par une forte croissance économique et l’amélioration des conditions de vie du plus grand nombre grâce à la RCTT, au développement de la sécurité sociale, à l’amélioration des services publics et à l’augmentation des salaires.

 

Mais, à partir des années 80, les gains de productivité ont été principalement captés par les actionnaires de grands groupes, un phénomène aggravé par une concurrence internationale exacerbée par la multiplication des accords de libre-échange. Cela a abouti à une précarisation des travailleurs salariés et indépendants, une explosion du chômage et du temps partiel non choisi, et un détricotage des conquêtes sociales.

 

Une société déprimée : pas d’alternative ?

 

En Belgique, sur ces 50 dernières années, le chômage a été multiplié par quatre (2) ! Parallèlement, les cadences ainsi que le stress au travail n’ont cessé d’augmenter. Près d’un travailleur sur quatre ressent du stress excessif au travail. Près d’un sur dix souffre de burn-out. En 2016, pour la première fois, les dépenses d’invalidité au travail ont dépassé le budget des allocations de chômage. Et tout ça alors qu’on n’a jamais produit autant qu’aujourd’hui et que les profits n’ont jamais été aussi élevés. Le problème n’est donc pas comment produire plus, mais comment répartir mieux.

 

Devons-nous accepter que nos conditions de vie se dégradent davantage sous prétexte d’une concurrence internationale féroce présentée comme une fatalité ? Ne pouvons-nous pas construire une tout autre société ?

 

Un projet de société

 

Si elle n’est pas, seule, « la » solution miracle à nos problèmes socio-économiques, la RCTT est une mesure permettant de s’attaquer sérieusement à plusieurs injustices sociales : créer des emplois de qualité en enrayant le chômage de masse, améliorer la qualité de vie en limitant la place qu’occupe le travail, rééquilibrer le partage des richesses concentrées dans les mains des actionnaires et permettre davantage aux femmes d’accéder à des temps pleins et aux droits qui y sont liés (chômage et pension). En travaillant moins, nous pourrions vivre mieux et travailler tous. Et puisque le modèle de création d’emplois basé sur la croissance économique est à bout de souffle et ne pourra plus répondre aux défis de demain, puisque le volume total d’heures de travail disponibles n’augmentera plus significativement, la principale solution d’avenir est de partager ces heures plus équitablement.

 

Cela semble impossible ? Pourtant, nous l’avons déjà fait à grande échelle depuis plus d’un siècle. Des RCTT ont déjà été obtenues par des luttes sociales à travers l’Europe au cours des 19e et 20e siècles. En Belgique, nous sommes passés de 84h par semaine en 1890 à 38h en 2003 (3).

 

Cette idée a aussi été concrétisée récemment dans d’autres pays comme la Suède, la France et dans certaines entreprises allemandes. En France, une loi encadrant l’expérimentation a permis à plus de 400 entreprises de mettre en place diverses formes de RCTT dont la semaine de 32h en 4 jours. Ces entreprises de tailles et de secteurs très différents ont pris le temps de se réorganiser et de former, créant ainsi des milliers d’emplois ! Cela n’a pas entraîné de délocalisation, épouvantail pourtant régulièrement agité par les opposants à la RCTT dont on peut se demander si l’objectif réel n’est pas de maintenir les travailleurs sous pression en agitant le spectre du chômage. Bien sûr ce n’est qu’un exemple parmi d’autres, qui a le mérite de démontrer la faisabilité concrète de la mesure.

 

Il existe plusieurs modèles de réduction collective du temps de travail, plus ou moins ambitieux, mettant plus ou moins à contribution les travailleurs, l’Etat ou les actionnaires. Plus notre mobilisation sociale et politique sera massive, plus le nouveau partage du travail que nous construirons sera juste. La remise à l’agenda de cette question est cruciale et urgente. Il est plus que temps de redonner une bouffée d’oxygène à l’ensemble de nos concitoyens, qu’ils soient travailleurs avec ou sans emploi, jeunes ou moins jeunes, hommes ou femmes !

 

Signataires : Adam Amir, président du Cercle du Libre Examen de l’ULB ; Anne Dufresne, chercheuse au GRESEA ; Anne-Françoise Theunissen, militante féministe ; Arnaud Lévêque, GT Travail digne de Tout Autre Chose ; Arnaud Lismond, secrétaire général du Collectif Solidarité contre l’exclusion ASBL ; Bruno Bauraind, secrétaire général du GRESEA ; Carmen Castellano, secrétaire générale des FPS ; Christian Kunsch, président du MOC ; Christine Kulakowski, directrice du CBAI ; Christine Mahy, secrétaire générale du Réseau Wallon de Lutte contre la Pauvreté ; Christine Pagnoulle, ATTAC Wallonie-Bruxelles ; Christine Steinbach, Equipes populaires ; Delphine Houba, membre du GT Partage du temps de travail du Collectif Roosevelt.BE ; Dietlinde Oppalfens, coordinateur Curieus Brussel (Beleidsmedewerker Curieus Nationaal) ; Dominique Surleau, secrétaire générale de Présence et Action Culturelles ; Dominique Vermeiren, ancien président du Cercle du Libre Examen de l’ULB ; Eric Goeman, porte-parole d’ATTAC Vlaanderen ; Esteban Martinez, professeur à l’ULB ; Felipe Van Keirsbilck, secrétaire général de la CNE ; Fred Mawet, secrétaire générale du CGé ; Geoffrey Guéritte, ancien président du Cercle du Libre Examen de l’ULB ; Gérard Valenduc, professeur invité à l’UCL et UNamur ; Henri Goldman, rédacteur en chef de la Revue Politique ; Jan Buelens, professeur à l’Universiteit Antwerpen et avocat à Progress Lawyers Network ; Jean Blairon, directeur de l’ASBL RTA ; Jean Cornil, essayiste ; Jean-François Ramquet, secrétaire régional de la FGTB Liège-Huy-Waremme ; Jean-François Tamellini, secrétaire fédéral de la FGTB ; Jean-Jacques Heirwegh, professeur à l’ULB ; Jean-Pascal Labille, secrétaire général de l’UNMS ; Khadija Khourcha, responsable nationale Travailleurs sans emploi de la CSC ; Ludovic Suttor-Sorel, ancien président du Cercle du Libre Examen de l’ULB ; Ludovic Voet, responsable national des Jeunes CSC ; Marc Goblet, secrétaire général FGTB ; Marc Jacquemain, professeur à l’ULg ; Marc Zune, GT Travail digne de Tout Autre Chose ; Marcelle Stroobants, professeure à l’ULB ; Marie-Hélène Ska, secrétaire générale de la CSC ; Mateo Alaluf, professeur à l’ULB ; Michel Cermak, président du Collectif Roosevelt.BE ; Nabil Sheikh Hassan, service d’étude de la CNE ; Nadine Gouzée, membre effectif du Club de Rome – Chapitre UE ; Nicolas Bardos, professeur émérite à l’UCL ; Olivier Bonfond, économiste au CEPAG ; Olivier De Schutter, professeur à l’UCL ; Pascale Vielle, professeure à l’UCL ; Philippe Busquin, ministre d’Etat ; Philippe Maystadt, ministre d’Etat ; Pietro Emili, directeur de la Maison du Peuple d’Europe ; Robert Cobbaut, professeur émérite de l’UCL et membre du Collectif Roosevelt.BE ; Robert Stéphane, président-fondateur Vidéographie ; Robert Verteneuil, secrétaire général de Centrale générale de la FGTB ; Roger Chaidron, membre du GT Partage du temps de travail du Collectif Roosevelt.BE ; Rudy Janssens, CGSP-ACOD Bruxelles ; Sébastien Robeet, GT Travail digne de Tout Autre Chose et Service d’études CNE ; Sonia Lohest, présidente des FPS ; Thierry Bodson, secrétaire général de l’Interrégionale wallonne de la FGTB ; Thierry Jacques, secrétaire fédéral de la CSC Namur-Dinant ; Thierry Kellner, professeur à l’ULB ; Vincent Fanara, plateforme « Du Temps Pour Nous ! » et membre de la Centrale Jeunes de la FGTB Liège-Huy-Waremme.

 

(1) Source : Conference board – database (2) Source : OCDE (3) Sources : Econosphères, SPF Emploi

 

Une carte blanche parue dans Le Vif et cosignée par le président du MOC. En plus d'être raciste, homophobe, sexiste et islamophobe, en plus de préparer une nouvelle vague de régression sociale contre le monde du travail, Donald Trump est un climato-négationniste.

 

 

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Donald Trump © Gage Skidmore

 

Durant la campagne électorale, le nouveau président des États-Unis a affirmé que le changement climatique est un canular inventé par "les Chinois" qui complotent perfidement pour ruiner l'industrie US. Qu'il se dise maintenant "ouvert" à la possibilité d'un lien entre les activités humaines et le réchauffement ne doit pas nous endormir. Cette inflexion dans ses propos n'est pas du tout confirmée par le choix de ses collaborateurs, comme la désignation d'un climato-négationniste à la tête de l'Agence Américaine de Protection de l'Environnement. L'expertise scientifique bâtie sur le savoir, les milliers de pages de rapports rigoureux soumis à la révision par les pairs, la confirmation par les faits observés : tout cela n'a aucune valeur aux yeux de M. Trump. Il veut supprimer les fonds attribués à la NASA pour la recherche sur le réchauffement. Surtout, le nouveau locataire de la Maison Blanche semble bien décidé à abroger en priorité les mesures limitées que son prédécesseur avait prises pour réduire la part du charbon dans l'économie étasunienne. Bien entendu, il n'est pas imaginable d'attendre de son administration le moindre frein aux nouvelles extractions, de gaz ou pétrole de schiste par exemple.

 

 

    Si Trump concrétise ses intentions, lui et son équipe devront être considérés comme coupables d'un crime planétaire contre l'humanité

 

 

L'ère Trump pourrait faire perdre au moins 4 années supplémentaires dans la lutte pour le climat. Pourtant, le verdict posé par des milliers de chercheurs est sans appel : il n'y a plus une minute à perdre pour tenter d'éviter un basculement brutal et irréversible. Les conséquences seraient tellement catastrophiques qu'elles dépassent l'imagination - non seulement à long terme mais aussi dans les prochaines années. En plus des impacts écologiques, des centaines de millions de gens sont menacés, notamment par la hausse du niveau des océans, la baisse de la productivité agricole, les sécheresses, les inondations et autres phénomènes météorologiques extrêmes. Où iront les hommes et les femmes frappées par ces catastrophes? Grossir les rangs des personnes déplacées et réfugiées que les pays riches refoulent sans pitié. Le tournant climato-négationniste a toutes les chances de faire plonger le monde de nos enfants dans la barbarie. Il faut donc le dire sans ambages : si Trump concrétise ses intentions, lui et son équipe devront être considérés comme coupables d'un crime planétaire contre l'humanité, contre l'environnement et contre la raison. Circonstance aggravante, ce crime aura été commis par le chef du pays qui est le principal responsable historique du changement climatique, contre celles et ceux qui en sont les moins responsables.

 

Nous savons que l'accord de Paris n'est qu'une déclaration d'intentions, notoirement insuffisante pour maintenir la hausse de la température de la Terre au-dessous de l'objectif adopté de 1,5°C. Nous savons que les seuls engagements concrets à ce jour - les contributions nationalement déterminées des 192 États qui ont approuvé les conclusions de la COP21 - nous mettent sur la voie d'un réchauffement probablement bien supérieur à 3°C d'ici la fin du siècle, avec des émissions qui poursuivent leur courbe ascendante alors qu'elles devraient décroître ! Nous ne pensons pas que les révisions périodiques prévues dans l'accord permettront de combler le fossé entre les intentions contenues dans l'accord et la réalité des contributions nationales. Non seulement parce que le temps presse plus que jamais, mais aussi parce que la politique climatique est néolibérale, taillée sur mesure pour et par les multinationales, et que sa mise en oeuvre est laissée à un marché incontrôlé, inefficace et structurellement pervers. Or, c'est précisément la concurrence pour le profit et la croissance qui en découle qui sont les causes fondamentales de l'accumulation de gaz à effet de serre. Nous le disons avec force : pour sauver le climat, il faut sortir de l'idéologie obsessionnelle du marché, changer de système, produire moins, produire pour les besoins, et partager plus. Partager les savoirs et les moyens, les ressources et les espaces. Décentraliser et relocaliser la production, d'énergie et alimentaire notamment, en favorisant son appropriation commune par les citoyens et les petits producteurs.

 

Aujourd'hui, il est encore possible d'éviter le pire. En s'appuyant sur la décision de principe adoptée à Paris de limiter le réchauffement bien au-dessous de 2°C, voire de 1,5°C, il est encore possible de faire avancer des alternatives à la hauteur du défi, des alternatives ancrées dans des luttes solidaires en faveur du mieux-être, du mieux-vivre, de l'égalité des droits et de la gestion prudente de la planète. Si l'on parvient à empêcher Donald Trump de mettre ses projets à exécution. Si l'on parvient à forcer certains gouvernements et l'UE, tentés de revoir leurs objectifs climatiques à la baisse, de les revoir à la hausse. La mobilisation est plus essentielle que jamais. Pour nous et nos enfants, pour notre bien commun la Terre, nous appelons à la mobilisation la plus large et à la solidarité avec les mouvements sociaux aux États-Unis et dans le monde entier. Nous appelons en particulier le mouvement des travailleurs et celui des activistes environnementaux à une lutte conjointe en défense du climat et des conquêtes sociales, contre les nationalismes et pour la solidarité.

 

Pour le climat, contre Donald Trump et son monde, nous appelons à un rassemblement avec casserolade, place de la Monnaie à Bruxelles, le vendredi 20 janvier de 17 à 19H sur la base suivante:

 

- Il n'y a pas de planète B

- Non au climato-négationnisme, non à l'obscurantisme

- Libérons-nous des fossiles

- Réduisons davantage les émissions de gaz à effet de serre, pas moins

- Pas de transition énergétique sans justice, pas de justice sans transition

- Produisons moins, pour les besoins, en partageant les ressources et les savoirs

- Travaillons moins pour travailler tous, pour de bons salaires et dans la solidarité

- Changeons le système, pas le climat

 

Mateo Alaluf (Sociologue), Paulo Charruadas (Historien, ULB), Chloé Deligne (ULB), Thibaut De Meulemeester (Biologiste, Climat et Justice sociale), Pierre Gillis (Physicien, UMons), Jean-Claude Grégoire (Professeur, ULB), Martin Guerard (JOC Mons - Borinage), Christian Kunsch (MOC), Jacinthe Mazzocchetti (Anthropologue, UCL), Pierre Ozer (Géographe, ULg), Bruno Poncelet (essayiste), Raphaël Rastelli (IEB), Isabelle Stengers (Philosophe), Daniel Tanuro (Climat et Justice sociale), Francis Taylor (Climat et Justice sociale), Léo Tubbax (Nucléaire Stop), Grégoire Wallenborn (Climat et Justice sociale).

Carte blanche issue du site web du quotidien Le Soir datant du 2 janvier 2017.

 

Le gouvernement fédéral concocte une dangereuse et insidieuse fragilisation de la sécurité sociale, dénoncent dans une carte blanche le front commun syndical et les mutuelles.


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Vendredi 16 décembre dernier, sans grand retentissement, sur proposition des ministres De Block et Borsus, le gouvernement fédéral a posé des jalons importants vers une réforme du financement de la sécurité sociale. L’adaptation du financement pour tenir compte de la réforme de l’Etat, la réforme du financement alternatif et la réactivation – temporaire – de la dotation d’équilibre portent des coups sévères à l’essence même du modèle de sécurité sociale. Ce projet de réforme ne doit pas être passé sous silence. A terme, il risque de rompre complètement l’équilibre d’une sécurité sociale qui fera désormais l’objet d’arbitrages politiques ancrés dans la loi.

 

Le projet de loi proposé a partiellement suivi l’avis que les partenaires sociaux avaient rendu en juillet 2015 : neutralisation de l’impact sur le budget de la sécurité sociale de la 6e réforme de l’État, simplification du financement alternatif (TVA et précompte mobilier), transfert des dépenses qui ne devraient pas relever de la sécurité sociale (ce qu’on a appelé les « œufs de coucou ») vers les départements concernés et le rétablissement, à partir de 2017, de la dotation d’équilibre (mais seulement pour 4 ans). Tous ces éléments passent largement au second plan en raison d’un sous-financement larvé (en raison d’une surestimation des effets retour) et du mécanisme dit de « responsabilisation ».

 

Le gouvernement fédéral concocte ainsi une dangereuse et insidieuse fragilisation de la sécurité sociale.


La « sécu » affaiblie par un financement instable

 

Le mécanisme dit de « responsabilisation » inclus dans le projet de loi revient en fait à ancrer dans la loi un levier qui permettra, lors de chaque discussion budgétaire, d’entamer au préalable un débat sur des « économies antisociales » et de remettre en cause les accords conclus entre partenaires sociaux. Nous connaissons déjà ce type de discussions avec le gouvernement actuel. Il en fut ainsi lors de la confection du budget 2017. La nouveauté est que ce marchandage aux dépens de la sécurité sociale serait désormais ancré dans la loi. Il se reproduira donc à chaque discussion budgétaire, tout comme ne cessera de se renforcer le déséquilibre criant entre le laxisme en termes de recettes fiscales et la rigueur à l’encontre des allocataires sociaux et des soins de santé.

 

A l’avenir, la sécurité sociale sera donc encore plus exposée à des arbitrages politiques permanents.


La mort de la cohésion sociale

 

Ce texte de loi affaiblit aussi significativement la concertation sociale à divers niveaux (remise en question des accords sociaux, mise sous tutelle des Comités de gestion…). Il autorisera en effet le gouvernement à corriger ou à ignorer des accords sociaux en fonction de leur impact budgétaire sur la sécurité sociale.

 

Il met également la sécurité sociale sous la tutelle d’une Commission Finance et Budget qui mettra à l’écart le Comité de gestion tripartite de la Sécurité sociale.

 

Ce « trompe-l’œil » d’une gouvernance soi-disant neutre et « technocratique » de la sécurité sociale cache surtout le renforcement du pouvoir du gouvernement. Pourtant, ce renforcement n’a guère de raisons d’être. D’une part, le gouvernement instaure déjà des mécanismes qui lui permettent d’imposer ses choix politiques. D’autre part, il attribue la responsabilité des mesures qui découlent de ses choix à d’autres, en l’occurrence les partenaires sociaux. Ceux-ci seront finalement contraints de proposer des mesures d’économies, le couteau sous la gorge et de s’assurer que le compte est bon.

 

En fin de compte, le gouvernement s’arroge subtilement, mais inexorablement, le droit de rétrécir la protection sociale. Alors même que les défis auxquels elle doit répondre sont de taille.

 


Répondre aux besoins de la population

 

Il est aujourd’hui essentiel de rappeler que les partenaires sociaux avaient plaidé, dès juillet 2015, pour un financement stabilisé de la sécurité sociale via une dotation d’équilibre pérenne qui offre la garantie que les ayants-droits pourront aussi bénéficier de leurs allocations sociales ou leurs soins de santé en fin d’année, non seulement jusqu'à fin 2020 mais aussi par la suite.

 

Dans le même ordre d’idée, il s’agit de renforcer le rôle des interlocuteurs sociaux sur l’avenir de la sécurité sociale au lieu de déstabiliser celle-ci. Enfin, il faut cesser d’appréhender la sécurité sociale comme un coût alors qu’elle est un élément essentiel de la cohésion sociale et du mieux vivre ensemble.

 

Elle est, en effet, un moyen de répondre aux besoins de la population. Les pensions doivent être garanties, les soins de santé doivent être remboursés et les invalides indemnisés ! La réalisation de ces objectifs n’est pas illusoire. La solution pour un financement équitable de la sécurité sociale est évidente : dans un premier temps, celui-ci passe inévitablement par une meilleure justice fiscale. Il n’est pas concevable que les politiques fiscales non-abouties du gouvernement aient pour conséquence de faire payer l’addition aux citoyens. Ceux-ci ont déjà donné, ça suffit !

 

Sans ce changement de cap que nous appelons de tous nos vœux, ce sera la fin de notre modèle de sécurité sociale.

 

Signataires :

 

Christian Kunsch, MOC Patrick Develtere, beweging.net Marc Leemans et Marie-Hélène Ska, CSC-ACV Luc Van Gorp et Jean Hermesse, MC-CM Rudy De Leeuw et Marc Goblet, FGTB-ABVV Michel Jadot et Jean-Pascal Labille, Solidaris Micheline Scheys et Paul Callewaert, Socialistische Mutualiteiten. Dominique Surleau, PAC Mario Coppens et Olivier Valentin, CGLSB-ACLVB

 

La Journée internationale des Migrants de ce 18 décembre, nous la dédions aux sans-papiers : ceux et celles dont on ne parle que peu, ou mal, dont la société dit ne pas vouloir, ceux et celles qui se trouvent au bout de la chaine de la citoyenneté et de la légitimité.

 

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 Manifestation à Bruxelles pour la régularisation pour les sans papiers. © Tijl Vercaemer

 

La cause des sans-papiers est passée sous silence... Elle est pourtant cruciale. Non seulement parce que leur situation s'aggrave de jour en jour, qu'ils sont la cible d'une politique migratoire belge marquée par une répression grandissante. Mais aussi parce que leur situation révèle jusqu'à quel degré les droits les plus fondamentaux communs à tous - et à travers eux, notre société - peuvent être attaqués.

 

Être sans-papiers en Belgique, c'est être là sans s'en voir reconnaitre le droit. C'est, à ce titre, courir le risque permanent de se faire arrêter, enfermer, expulser. De quoi condamner à vivre dans l'ombre et dans la peur 100 à 150.000 femmes, hommes et enfants, qui vivent en Belgique souvent depuis des années, y ont développé des attaches fortes - affectives, familiales, professionnelles - et estiment ne pas pouvoir rentrer dans leur pays, dévasté par les injustices et la violence.

 

Chaque jour, des personnes sans-papiers sont arrêtées - dans la rue, à leur domicile, à la commune ou encore à l'Office des étrangers - et sont envoyées en centre fermé, pour n'avoir commis d'autre délit que celui de ne pas disposer de titre de séjour. En 2015, 6.229 personnes ont été détenues dans ce cadre et 80% d'entre elles ont été renvoyées vers le pays d'où elles provenaient.

 

Ces mêmes personnes sont, de par leur situation ultra-précaire, exploitées quotidiennement sur le marché du travail. Le 18 décembre, qui commémore l'adoption de la Convention internationale sur la protection des droits des travailleurs migrants et des membres de leur famille, peut à ce titre d'autant plus leur être dédié. Les sans-papiers, sans sécurité ni droits, sont - plus encore que tous les migrants - instrumentalisés comme de véritables outils de dérégulation du droit du travail, permettant de faire pression sur le salaire de tous les travailleurs. La signature de cette convention par l'État belge et sa mise en oeuvre s'imposent d'urgence, pour que soit mis fin à cet esclavage qui ne dit pas son nom.

 

    Chaque jour, des personnes sans-papiers sont arrêtées et sont envoyées en centre fermé, pour n'avoir commis d'autre délit que celui de ne pas disposer de titre de séjour.

Au-delà du risque quotidien d'arrestation et de leur exploitation au travail, les sans-papiers ont dernièrement fait l'objet d'une attention toute particulière de la part des autorités belges.

 

Le 16 mars 2016, Hamed, porte-parole du collectif des Afghans, était expulsé vers l'Afghanistan. Le 24 novembre dernier, c'était le tour de Sow, représentant du collectif Ebola, d'être renvoyé de force vers la Guinée-Conakry. En arrêtant ces deux leaders du mouvement des sans-papiers, les autorités donnaient un signal fort aux militants de la cause et privaient de nombreuses personnes de la voix qui leur était donnée sur la place publique.

 

Nous restons également marqués par l'évacuation du collectif La Voix des Sans Papiers, le 19 septembre à Molenbeek, qui s'est déroulée moyennant des dispositifs guerriers - hélicoptères et armes lourdes - pour déloger quelques personnes complètement désarmées. Régulièrement, des dizaines de personnes et familles sans-papiers sont évacuées du lieu inhabité qu'elles occupaient collectivement, pour avoir un toit mais aussi en vue de rendre leur cause visible. Trop souvent, ces collectifs sont évacués sur base de motifs bancals et ce, vers nulle part, sans qu'aucune alternative d'hébergement leur soit proposée, en hiver comme en été.

 

Dans sa note politique du 27 octobre dernier, le Secrétaire d'État à l'asile et à la migration annonçait sa volonté d'augmenter le nombre de places en centre fermé, d'étendre la durée de détention à 18 mois, et d'enfermer à nouveau des familles avec enfants. Il prévoit en outre une modification de loi permettant la violation du domicile - principe garanti par la constitution -, en vue de faciliter l'arrestation des personnes en séjour irrégulier.

 

Ces mesures répressives en cascade s'institutionnalisent l'une après l'autre et s'accompagnent de discours criminalisant, associant de manière répétitive et inlassable les qualificatifs d'étrangers, d'illégal et de criminel. Une association renforcée par des opérations telles que "Gaudi", véritables chasses aux personnes sans-papiers commettant de petits délits, permettant de focaliser l'attention sur une petite minorité, absolument non représentative de l'écrasante majorité.

 

De quoi donner raison aux personnes qui ont peur des étrangers, justifier les politiques mises en oeuvre à leur égard et ainsi produire une population exclue de toute citoyenneté, sans dignité ni droits.

 

La répression sévit et l'étau ne cesse de se resserrer autour des sans-papiers, dans une indifférence quasi générale, construite autour de fantasmes sécuritaires anti-migrants et oubliant la part de responsabilité de nos gouvernements, non fantasmée elle, dans les causes qui chassent ces personnes de leur pays. La logique ici dénoncée s'exerce certes de manière exacerbée vis-à-vis des personnes sans droit de séjour, mais les citoyens européens n'en sont pas épargnés.

 

Ce 1er décembre, comparaissaient devant le tribunal six passagers d'un avion qui, le 17 août dernier, s'étaient levés pour contester le traitement réservé à un homme que la police tentait de contraindre au retour vers le Cameroun. Le Secrétaire d'État a précisé qu'il lancerait les mêmes poursuites contre toute personne qui se manifesterait en ce sens et ce, au nom du "coût" élevé d'une expulsion échouée et de la "frustration" que cela peut générer chez les agents en charge de cette expulsion. Sans égard pour ce que peut ressentir la personne expulsée, ni pour la nécessité démocratique d'un contrôle citoyen.

 

La même répression est de mise pour les chercheurs d'emploi, les bénéficiaires de l'aide sociale, les ayants droit à l'aide juridique, soupçonnés a priori d'imposture et soumis à des contrôles toujours plus pressants.

 

Laisser ces mesures prendre le pas, c'est cautionner le déploiement sournois et progressif d'un tel modèle de gestion de la société dans son ensemble. Un modèle dangereux qui - il le montre déjà - a le pouvoir de faire déraper la démocratie et les libertés qui lui sont inhérentes. Difficile, sous cet angle, de taire le goût de déjà vu que le climat actuel dégage. Au final, les premiers visés ne sont pas les seuls à avoir souffert, c'est l'ensemble de la société qui en a été profondément meurtrie.

 

Alors, à bon entendeur : "C'est pas les immigrés, c'est pas les sans-papiers, c'est la loi qu'il faut changer",

 

Signataires :

 

CEPAG, CIRÉ, CNE, Coordination des sans-papiers, CSC, FGTB, Journal des Sans-Papiers, La Communauté du Béguinage, La Marche des Migrants de la région du Centre, Le Monde des Possibles Asbl, Migrations et Luttes Sociales, MOC, MRAX, Sireas/SASB, SOS Migrants.

 


Clip de la coordination des Sans Papiers :     https://youtu.be/4ihES4OrrSk

stopCETALes organisations de la société civile européenne et canadienne appellent au rejet de l'AÉCG / CETA

 

Novembre 2016

 

Nous, soussignées, organisations de la société civile d'Europe et du Canada, tenons à exprimer ici notre profonde inquiétude par rapport à l'Accord économique et commercial global (AÉCG /CETA) entre l'Union européenne et le Canada.

 

Tout au long des négociations et de la phase de vérification juridique du texte, nous avons dénoncé à maintes reprises les graves problèmes que pose le texte de l'accord. Nous avons fait des propositions concrètes qui cherchaient à démocratiser nos politiques commerciales et à les rendre plus transparentes, tout en les recentrant sur la protection de l'environnement et la défense des droits humains fondamentaux. Mais comme en fait foi le texte de l'AÉCG / CETA tel que signé en octobre 2016, nos inquiétudes sont restées lettre morte et c'est pourquoi nous nous opposons résolument à sa ratification.

 

Un nombre croissant de citoyennes et citoyens des deux côtés de l'Atlantique partagent nos objections. Un chiffre record de 3 millions et demi de personnes à travers l'Europe ont signé une pétition contre l'AÉCG / CETA et son jumeau, l'accord de Partenariat transatlantique de commerce et d'investissement (TAFTA / TTIP) entre l'Union européenne et les États-Unis. Plus de 2 100 gouvernements locaux et régionaux se sont déclarés zones hors-TAFTA / hors-CETA. La constitutionnalité de l'AÉCG / CETA est contestée tant en Allemagne qu'au Canada, tandis que la Cour de justice de l'Union européenne se penchera vraisemblablement sur la légalité des privilèges controversés que l'accord octroie aux investisseurs étrangers... Lire la suite de cette position

Voir la liste des 450 signataires

21591356588 700d137b20 zAlors que des milliers de personnes fuient la guerre et sont toujours en besoin de protection aux frontières de l'Europe, les priorités du Secrétaire d'État à l'asile et à la migration sont tout autres : augmenter le nombre d'expulsions; créer 1.000 places supplémentaires en centres fermés et allonger la durée de détention ; sanctionner les avocats qui défendent les migrants; faire payer des amendes administratives aux étrangers...

 

Autant de priorités qui visent à intensifier le combat dit "contre l'illégalité". Avec bien souvent, en toile de fond, pour justifier ces mesures, l'alibi de la lutte contre la criminalité pour renforcer la sécurité. Ce combat rejoint les autres priorités de ce système qui traque les personnes sans emploi, les pauvres, les sans-abri...

 

Enfermer, expulser, sanctionner, dissuader pour combattre "l'illégalité"... De quoi alimenter la peur de l'étranger et, au passage, renforcer les amalgames entre sans-papiers, migrants et criminels, voire terroristes.

 

Faut-il encore rappeler que personne n'est "illégal" ? Ces hommes, ces femmes et ces enfants sont poussés hors de leur pays par la guerre, les violences, la misère ou le réchauffement climatique. Ils se retrouvent sans papiers ici parce qu'ils ont perdu leur droit de séjour, parce qu'ils ont été déboutés du droit d'asile, parce que leur visa d'étudiant a expiré, parce que leur permis de travail n'a pas été renouvelé ou encore parce qu'ils ne répondent plus aux conditions financières strictes du regroupement familial. Ils travaillent dur, dans des conditions déplorables, souvent pour faire des boulots sous-payés, dans un système d'économie informelle engendré lui-même par la concurrence structurelle des travailleurs, basée sur l'activation de la peur et de l'insécurité.

 

L'irrégularité de leur séjour, c'est la politique migratoire qui l'a créée. Les migrants bloqués aux frontières de l'Europe ou exclus du droit de séjour en Belgique font les frais d'une même politique de fermeture et de déni d'humanité. Notre gouvernement, ne reconnaissant pas qu'ils existent, qu'ils ont des attaches en Belgique et qu'ils sont aussi souvent une plus-value pour le pays, refuse de régulariser leur situation, alors qu'il en a le pouvoir. Il choisit de mettre la priorité sur la détention et l'expulsion, des mesures coûteuses et inhumaines, dont l'enjeu est davantage symbolique et médiatique, distillant ainsi une image du migrant abuseur, criminel, dangereux. Montrer que l'on a un contrôle sur les migrants "illégaux", qu'on les enferme dans des lieux sécurisés, et qu'on les renvoie de force chez eux, permet d'asseoir un pouvoir qui joue sur l'insécurité des citoyens générée par le terrorisme.

 

Ces politiques répressives et le discours de stigmatisation des migrants qui les accompagne ne sont pas des solutions pour lutter contre le terrorisme et ont de lourdes conséquences sur la cohésion sociale, sur le vivre ensemble. En attisant les peurs, en mettant en évidence des événements qui restent des exceptions, en renforçant les préjugés, on monte les individus les uns contre les autres et on renforce ainsi la véritable insécurité.

 

Quand la Belgique sortira-elle du carcan de la peur, du fantasme de l'invasion, du mythe du migrant dangereux et abuseur? Quand considérera-t-elle la migration comme un phénomène naturel et humain ? Quand entendrons-nous en priorité les mots "accueil", "intégration", "dialogue", "rencontre" dans la bouche de nos dirigeants politiques ? Quand oseront-ils enfin faire le choix d'une politique migratoire juste et ouverte, à la hauteur des valeurs que notre société prétend incarner?

 

Parce qu'à travers notre politique migratoire se pose la question du modèle de société que nous voulons : une société basée sur le mépris de la dignité humaine, la répression et l'expulsion ou une société basée sur le respect, la solidarité et l'accueil ? Le Secrétaire d'État semble avoir tranché. Nous aussi.

 

Signataires:

Patrick Verhoost, Aide aux personnes déplacées

Anne-Marie Andrusyszyn, Directrice du Centre d'éducation populaire André Genot (CEPAG)

Caroline Intrand, Co-directrice de la Coordination et initiatives pour réfugiés et étrangers (CIRÉ)

Anne Léonard, Secrétaire nationale de la CSC

Philippe Vansnick, Secrétaire fédéral adjoint de la CSC Bruxelles-Hal-Vilvorde

Thierry Bodson, Secrétaire général de la FGTB wallonne

Jean-Francois Tamellini, Secrétaire fédéral de la FGTB

Philippe Van Muylder, Secrétaire général de la FGTB Bruxelles

Alexis Deswaef, Président de la Ligue des droits de l'Homme

Véronique Oruba, Secrétaire nationale du Mouvement ouvrier chrétien (MOC)

Vincent Cornil, Directeur du Mouvement contre le racisme, l'antisémitisme et la xénophobie (MRAX)

Annick Deswijsen, Coordinatrice de Point d'appui

 

voeux2016A bien des égards, 2015 restera comme une année noire s’il s’agit de compiler les événements qui ont marqué l’actualité sociale, politique et internationale.
L’énumération fait malheureusement froid dans le dos.


•    Sur le plan belge, le gouvernement Michel a accumulé les attaques frontales vers ce modèle social que nous avons mis des décennies à construire. Dès le premier janvier, même s’il s’agissait d’un héritage du gouvernement précédent, entraient ainsi en vigueur la dégressivité des allocations de chômage et la limitation dans le temps des allocations d’insertion. Ce n’était que le début d’une longue série de mesures injustes et inefficaces. En un mot : des mesures dogmatiques imposées malgré la mobilisation syndicale la plus forte depuis l’après-guerre. Citons en vrac : le saut d’index, le recul de l’âge de la pension, le tax shift « à l’envers »,  les coupes dans le budget des soins de santé, la diminution du montant de l’allocation de garantie de revenus,… En bref, un détricotage généralisé de la sécurité sociale couplé à un désinvestissement dans les services publics, avec, en point de mire, les plus fragilisés: allocataires sociaux, chômeurs, malades, jeunes, femmes, étrangers,…

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PaulSmithDevant les défis sociaux, environnementaux et de mobilité, nous entendons dénoncer l’inadéquation, le manque d’ambition et les dangers de la politique belge en matière de chemin de fer.


Notre pays est l’un des plus embouteillés d’Europe. Les coûts économiques de cette mobilité sont gigantesques. Les coûts sociaux et d’infrastructure également : insécurité, stress, dégradation de la qualité de vie, entretien des routes. Se déplacer en voiture coûte en moyenne trois fois plus cher à la société que d’utiliser le train. Dans ce cadre, de nombreux Belges ont choisi le rail. La fréquentation du chemin de fer a augmenté de 46 % depuis 2000, prouvant le succès et la nécessité de ce mode de transport et l’urgence d’y investir pour assurer un service public de qualité et répondant à la demande.


Du point de vue environnemental, le rail est une priorité. À politique inchangée, les émissions belges de gaz à effet de serre dues au transport ne diminueront pas d’ici 2030. Or, se déplacer en train plutôt qu’en voiture fait baisser ces émissions d’au moins 80 %. En outre, cette pollution nuit à la santé. À titre d’exemple, les émissions de particules fines, dont un tiers sont liées au transport, font perdre en moyenne 36 mois d’espérance de vie à chaque Belge.


Quatre enjeux majeurs


La politique de la ministre Galant et des dirigeants de la SNCB et d’Infrabel répond-elle à ces enjeux et aux attentes de la population ?
On annonce une baisse de la dotation des chemins de fer de 20 %. Affirmer qu’avec tant de moyens en moins le rail sera performant est impossible. Au contraire, alors que les voyageurs, devenus clients dans les documents officiels, sont soi-disant au centre des préoccupations, ces coupes vont nuire à la régularité des trains, au service, au confort, voire à la sécurité.


D’abord, ces restrictions budgétaires menacent 800 kilomètres de voies sur les 3.800 du royaume, car l’offre y est jugée insuffisamment rentable. Il s’agit surtout de lignes rurales, où le service serait supprimé ou remplacé par des bus. De même, les trains hors heure de pointe, moins remplis, sont menacés. Ce mouvement va à l’encontre d’un service public couvrant les populations isolées ou contraintes de travailler à horaire décalé.


Deuxièmement, ces coupes restreignent et retardent les investissements. De nouveau, les tronçons plus rentables seront privilégiés, quand d’autres projets seront abandonnés. Parlons aussi du RER, dont l’issue est une nouvelle fois reportée. De plus l’allongement des chantiers pèse sur la qualité du service. Pour masquer cette situation et augmenter les statistiques de ponctualité, les temps de parcours ont été allongés : sur certaines lignes, les trains sont plus lents qu’il y a 30 ou 40 ans.


Un troisième enjeu est l’évolution des tarifs. Selon les dirigeants de la SNCB, le prix payé par les usagers pourrait augmenter de 50 %. Cela ira à l’encontre d’un service accessible à tous, le budget de transport pesant plus sur les plus pauvres. De même, l’idée de moduler les tarifs en fonction de l’heure d’utilisation pénalisera les navetteurs obligés de voyager aux heures d’affluence.


Quatrièmement, les réductions de personnel, on prévoit la disparition de 7.000 postes, auront de nombreuses conséquences négatives : suppression de guichets, du service et du contrôle social qu’ils offrent, mise en place de trains sans accompagnateur, entravant encore l’accès des personnes à mobilité réduite, faute d’aide à l’embarquement, ainsi que le service et la sécurité dans les trains.


Privatisation au rabais ?


En sous-finançant délibérément le rail, cette politique vise en réalité à préparer sa libéralisation. En rendant la situation intenable – investissements reportés, suppression de services, nombre et qualité de trains insuffisants par rapport à la demande – ces décisions vont encourager l’entrée du privé pour combler ce que ne financera plus le public, voire la privatisation au rabais de services publics devenus inefficaces.


Pourtant, les exemples belges et étrangers montrent que la libéralisation mène dans le mur.


Commençons en Belgique. En 2011, dans le cadre de la politique européenne, le transport ferroviaire de marchandises y a été libéralisé. Depuis, de nombreux opérateurs privés sont actifs. Pourtant le trafic a baissé de 15 à 20 % !


Au Royaume-Uni la privatisation et la libéralisation du transport de voyageurs datent des années 1990. Ce rail privatisé coûte toujours autant à l’état britannique, n’est pas plus efficace, est beaucoup plus cher pour les usagers et est moins sûr. À ce sujet, en Belgique, plusieurs accidents majeurs impliquant des convois de marchandises se sont produits depuis la mise en œuvre de la libéralisation et sont le fait d’opérateurs privés.


Enfin, aux Pays-Bas, pays exemplaire aux yeux de la Ministre et des dirigeants du rail, la majorité des usagers sont insatisfaits du service libéralisé et privatisé et même les responsables ayant participé à ces décisions dénoncent leurs effets négatifs.


Pour répondre aux défis sociaux de mobilité et environnementaux, le rail est appelé à jouer un rôle crucial : plus écologique, il est aussi plus économique pour la société que les autres modes de transport, voiture en tête.


Loin des restrictions budgétaires qui mèneront à l’asphyxie des chemins de fer et de la population, un plan ambitieux est nécessaire. Un plan qui investit des moyens et de la main-d’œuvre dans un réseau dense, autour des grandes villes et dans les régions rurales. Un plan visant des tarifs moins élevés, car toute hausse est la meilleure publicité pour la voiture. Un plan ambitieux aussi pour les marchandises.


Un débat démocratique avec les usagers et les cheminots doit être mené sur les projets et sur les moyens pour améliorer le fonctionnement du rail. Devant le rouleau compresseur de la pensée libérale, osons dépasser un tabou : défendons un rail public, pour le bien de la société, des finances publiques et de l’avenir de la planète.

 


Signataires: Michel Abdissi, président CGSP Cheminot ; Serge Piteljon, secrétaire général CGSP Cheminot ; Marianne Lerouge, responsable générale CSC Transcom secteur rail ; Isabelle Bertrand, secrétaire nationale CSC Transcom secteur rail ; Felipe Van Keirsbilck, secrétaire général CNE ; François Hubert, chargé de mission Inter-Environnement Bruxelles ; Christine Mahy, secrétaire générale Réseau Wallon de Lutte contre la Pauvreté ; Aurélie Willems, secrétaire générale Gracq ; Christian Kunsch, MOC ; Natalie Eggermont, présidente Climate Express ; Stéphane Vanden Eede, Acteurs des temps présents ; Mathieu Strale, IGEAT-Université Libre de Bruxelles ; Eva Deront, Alternatiba Bruxelles ; Jean-Pierre kerckhofs, APED (appel pour une école démocratique) ; Robert Verteneuil, Centrale Générale FGTB/Algemene Centrale ABVV ; Frédérique Mawet, CGE (changement pour l’égalité) ; Pascal Chardome, CGSP Enseignement ; Eugène Ernst, CSC Enseignement ; Gilbert Lieben, CGSP wallonne ; Delphine Chabbert, Ligue des familles ; Christine Steinbach, Equipes populaires ; François Gobbe, Kairos Europe ; Pierre Schoenmann, Fédération des associations de santé ; Daniel Puissant, RJF-Réseau Justice Fiscale ; Jean Blairon, RTA, Réalisation, Téléformation Animation ; Aubry Mairiaux, UNSP (Union Nationale des Services Publics) ; Observatoire Belge des Inégalités ; Tout autre chose ; Projet Lama ; Nucléaire STOP Kernenergie ; Attac Bxl 2 ; Attac Liège.

Copyright Miguel DiscartLa plupart d’entre eux sont aussi passés par là. Ils ont aussi fait une longue et périlleuse route pour arriver en Belgique ; ils ont aussi fait la file devant l’Office des étrangers pour y demander l’asile ; ils ont aussi essayé de trouver leur chemin dans des procédures compliquées et difficiles à comprendre. Au final, ils n’ont pas obtenu la protection de l’Etat belge ni le droit de rester sur le territoire… et se sont ainsi retrouvés « sans-papiers ».

Pourquoi ? Parce qu’ils n’entrent pas dans les cases prévues par la législation de la protection internationale ni celle, très restrictive, de la régularisation.

Un retour dans leur pays est pourtant impossible, pour de nombreuses raisons, notamment parce qu’ils viennent de régions dévastées par les injustices et la violence et qu’y retourner mettrait leur existence en difficulté, voire en danger.

40 % des personnes qui demandent l’asile en Belgique aujourd’hui recevront demain une réponse négative. Certains retourneront dans leur pays, d’autres se retrouveront dans cette situation.

Ils se verront alors rangés du côté des « mauvais » migrants, ceux dont on ne veut pas, et seront à ce titre déshumanisés, criminalisés.

Pourtant, les migrants sont loin d’être une menace. Il est clairement démontré par l’OCDE ou le PNUD que l’immigration a un impact légèrement positif sur les grandes variables de l’économie. Le sentiment d’insécurité est moins lié à la présence de migrants qu’aux discours démagogiques qui créent la peur. Enfin, l’apport culturel des migrations s’avère être une composante essentielle de nos sociétés.

La distinction entre « bons réfugiés » et « mauvais migrants » ou sans-papiers est réductrice et fausse, parce que les crises qui chassent hors de chez elles les personnes migrantes sont bien plus complexes que la dichotomie guerre ou pauvreté. Les crises économiques ne sont-elles pas très souvent le résultat de régimes dictatoriaux ou de guerres ? Combien de conflits ne trouvent-ils pas leur source dans des injustices criantes, des inégalités insupportables ?

Cette distinction est en outre dangereuse, parce qu’elle légitime l’atteinte aux droits fondamentaux de centaines de milliers de personnes qui ne se voient pas accorder le droit de séjour, comme on le voit aux frontières de l’Europe, mais aussi quotidiennement en Belgique, dans les centres fermés dont la capacité augmente, dans le travail au noir surexploité, dans nos quartiers où les sans-papiers vivent dans des logements insalubres au prix exorbitant, voire dans des squats.

Alors, à quoi sert ce clivage aussi faux que dangereux ? A créer des bouc émissaires sur qui faire peser tous les maux de notre société. A détourner l’attention de l’opinion publique des vrais problèmes sociaux et politiques. A permettre la création d’une main-d’œuvre malléable et extrêmement bon marché.

L’opprobre jeté sur les « migrants économiques » n’a de sens que dans la bouche de ceux que cela arrange : ceux qui tiennent une rhétorique excluante, répondant aux impératifs d’une politique migratoire basée sur une logique sécuritaire et des calculs économiques cyniques.

Les choix politiques qui se posent à la Belgique et à l’Europe en matière d’accueil ne concernent pas uniquement les demandeurs d’asile, mais plus globalement l’ensemble des personnes qui – pour des raisons de déséquilibres mondiaux dont nous sommes tous témoins – sont portées vers notre pays par l’espoir d’une vie sauve et d’un avenir meilleur.

Qu’ils soient coincés aux frontières de l’Europe, privés d’un accueil digne ou exclus du droit de séjour, l’ensemble des migrants partagent – outre le manque cruel de sécurité d’existence – le coût d’une même politique : celle de la fermeture et du déni.

Quand l’Europe et la Belgique sortiront-elles du carcan de la peur, du fantasme de l’invasion et du mythe du migrant dangereux, abuseur ? Quand prendront-elles enfin acte du caractère structurel et profondément humain de la migration ? Quand oseront-elles enfin faire le pas d’une politique juste et ouverte, à la hauteur des valeurs que notre société prétend incarner ?

Le défi qui se pose à la Belgique comme à l’Europe porte sur leur capacité à tenir compte des réalités de la mobilité aujourd’hui, ainsi que des besoins des migrants et de nos sociétés, puis à composer avec cette réalité et à veiller à l’encadrer, dans et pour le respect des droits et de la dignité de tous. A commencer par un véritable élargissement des voies d’accès au séjour légal en Belgique. Ainsi que par la régularisation de tou(te)s ceux et celles qui vivent des situations humanitaires auxquelles la procédure d’asile et les voies actuelles de migration légale n’ont pas pu apporter de réponse. Et par la dépénalisation du séjour illégal.

En participant à l’élan citoyen au parc Maximilien, ces sans-papiers – qui vivent dans le non droit – font en tout cas preuve d’une solidarité exemplaire. Ils exercent déjà cette citoyenneté qu’on leur refuse. Et ils recréent le lien, là où des préjugés dangereux tentent de l’empêcher.

Pour ces raisons, les signataires de cette carte blanche proposent d’élargir le combat à l’ensemble des personnes migrantes et invitent chaque citoyen à manifester sa solidarité aussi avec les sans-papiers, pour une Europe véritablement ouverte et solidaire.

Les sans-papiers étaient présents en nombre à la marche citoyenne de ce dimanche 27 septembre, pour l’accueil des réfugiés. Vous pourrez aussi les rencontrer et les soutenir à la manifestation qu’ils organisent à Bruxelles le 25 octobre 2015.

*Signataires : ACV-CSC ; Bruxelles Laïque ; Cap migrants ; Caritas International ; Centre Social Protestant ; CIRÉ ; CNCD-11.11.11. ; CNE ; Collectif Migrations et Luttes Sociales ; Coordination des Sans Papiers ; CSC Bruxelles-Halle-Vilvoorde ; Eglise du Béguinage et sa Communauté ; Equipes Populaires ; FGTB ; Jesuite Refugee Service ; Ligue des Droits de l’Homme ; Médecins du Monde ; MOC ; MRAX ; PICUM ; Pigment ; Plateforme citoyenne de soutien aux réfugiés Bruxelles ; Point d’Appui ; Progress Lawyers Network ; Samenlevingsopbouw Brussel ; SESO ; SOS Migrants.

Copyright photo: Miguel Discart

lg_quadrigene_basLes pouvoirs publics doivent-ils renforcer le cadre réglementaire réglant l’octroi des licences d’armes ? Comment éviter que des armes produites et exportées à partir de la Région wallonne ne puissent servir à réprimer des populations, asseoir des pouvoirs dictatoriaux, servir au marché noir international de l’armement ?

Pour le Gouvernement wallon, la réponse semblait claire en 2009 : « le développement économique ne peut faire fi des exigences éthiques et des droits fondamentaux à préserver »[1]. Cette profession de foi tranchait apparemment l’éternel débat entre un secteur de l’industrie de l’armement, florissante, désireux d’un cadre réglementaire le plus léger possible, et un secteur associatif attentif aux conséquences humanitaires dramatiques de la prolifération des armes légères dans le monde.

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Logo MOCSortir de la crise économique et sociale provoquée par le capitalisme financier, tout le monde le souhaite. Pourtant, cette unanimité se rompt dès qu'il s'agit d'envisager la manière d’en sortir et le modèle de société vers lequel tendre. Thierry Jacques, président du MOC, plaide pour une réduction et un meilleur partage du temps de travail, dans une carte blanche publiée dans L’Echo du 6 avril 2010. Le texte se présente aussi sous une version longue, plus détaillée.

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